Nicolas Batum : « J’ai gardé les pieds sur terre en NBA »

Depuis qu’il est arrivé à Nancy, Nicolas Batum n’a plus une minute à lui. La presse française se l’arrache. Un après-midi, il nous a consacré du temps dans un bar de la fameuse Place Stanislas et a répondu à nos questions en toute décontraction et sans langue de bois.

 

Le weekend dernier, le SLUC Nancy est allé jouer contre Le Mans (victoire du Mans 80 à 78). Comment as-tu vécu ce retour dans ton club formateur ?

 J’étais heureux de retourner au Mans. J’ai énormément de respect pour les gens là-bas. Ce sont des gens bien et je respecte cette ville. Mais j’ai eu énormément de mal avec ce qui a été dit (le président du Mans, Christophe Le Bouille, a vivement critiqué dans la presse le choix de Nicolas Batum de signer à Nancy, déclarant être « déçu et qu’il lui en voulait terriblement). Mais je suis expliqué avec Christophe Le Bouille et j’étais là pour gagner. C’était le plus important.

Tu as commencé ta carrière très jeune dans la Sarthe. Comment devient-on professionnel à 16 ans ?

 J’ai eu la chance d’être dans la bonne équipe au bon moment et d’avoir un entraineur, Vincent Collet, qui voulait former beaucoup de jeunes. D’ailleurs, je suis content de le retrouver en équipe de France parce qu’il me connait. Avant d’aller au Mans, on m’a envoyé à l’INSEP pour passer des tests mais ils ne m’ont pas pris parce qu’ils trouvaient que je n’avais pas de talent. Au final, je pense que c’est la meilleure chose qui me soit arrivé. Le gars qu’ils ont choisi à ma place, il joue en troisième division maintenant! Je ne critique pas l’INSEP, ils ont sorti le meilleur joueur de France, Tony Parker, mais l’INSEP, c’était pas pour moi. Le Mans, c’était la meilleure option pour moi.

Tu as été drafté en 2008 par Portland. Comment as-tu vécu ton arrivée en NBA ?

 Quand tu arrives, tu rentres dans un autre univers. Mon premier match en NBA, c’était contre les Los Angeles Lakers. J’étais impressionné parce que la taille des salles ne sont pas les mêmes. Aux Etats-Unis, il peut y avoir jusqu’à 30000 personnes lors des gros matchs donc quand tu arrives là, pour ton premier match, tu peux être impressionné. Mais même contre les Lakers, j’étais là pour gagner donc j’ai joué mon match, j’étais là pour faire mon boulot.

Comment fait-on pour garder la tête sur les épaules quand on arrive en NBA à 19 ans ? On peut vite prendre la grosse tête là-bas ?

 Oui, on peut prendre la grosse tête mais j’ai eu la chance d’avoir ma mère et ma sœur avec moi à Portland pendant mes deux premières années en NBA. Donc ma mère m’a permis de garder les pieds sur terre. Quand tu arrives en NBA, t’as des nouveaux potes qui arrivent. Des gens que tu connais pas et qui s’intéresse à toi parce que t’as de l’argent et tout. Je fais attention à qui je fréquente.  Mais c’est vrai qu’on peut vite péter les plombs. En France, il y a une quinzaine de personnes dans le staff d’une équipe de Pro A. A Portland, il y a 207 personnes qui travaillent pour quinze joueurs. Pour aller dans les différentes villes, les équipes ont des Boeing. Pas des jets privés, des Boeing ! Et on est des dieux à Portland ! Ils nous prennent pour des rock stars. Donc, quand tu viens de France, si t’es pas entouré, tu peux prendre la grosse tête.

Les joueurs de la NBA sont parfois très musclés alors que les joueurs français sont assez fins. A quoi est due cette différence ?

 Les américains sont obsédés par le travail. A cinq heures du matin, ils sont en salle de musculation à soulever de la fonte. J’arrive à 9 heures, ils ont le visage plein de sueur. Ils bossent beaucoup pendant la saison mais ils continuent aussi à travailler l’été, pendant les vacances. En France, on bosse pas autant qu’eux et c’est pour ça qu’on est moins forts.

Cet été, pendant le lock-out, tu as décidé de revenir jouer en France. Pourquoi as-tu choisi Nancy ?

Je voulais jouer l’Euroligue en fait. J’aurais pu retourner au Mans mais l’Euroligue, c’est la meilleur ligue du monde après la NBA donc c’est pour ça que j’ai signé ici. Et puis, Nancy, c’est le champion de France donc ça prouve que c’est une grosse équipe.

Qu’est-ce que ton passage à Nancy a changé dans ta carrière ?

 Ça m’a apporté de l’expérience et de la crédibilité. Déjà, après l’Euro avec l’équipe de France, je faisais plus peur (à ses adversaires). Avant, on ne savait pas qui j’étais vraiment. Maintenant, on sait qui je suis et le premier qui me dégage sur le terrain, il a une prime ! Et puis, l’Euroligue, c’est moins athlétique que la NBA mais c’est plus stratégique. Je me perfectionne.

Bientôt, tu reviendras à Portland pour le début du championnat. Comment imagines-tu ton retour ?

 Quand je reviendrai à Portland, je serai plus fort. Un journaliste qui me suit depuis mon arrivée aux Etats-Unis m’a vu jouer avec Nancy et il m’a dit que j’avais changé. Donc j’espère que mon rôle à Portland changera aussi. Ici, à Nancy, je marque beaucoup plus de points qu’en NBA donc j’espère que ça sera la même chose quand je reviendrai à Portland et que j’aurai un rôle plus important.

Nicolas Batum a quitté le SLUC Nancy quatre jours après cette interview, le lock-out étant terminé. Il a retrouvé Portland pour un nouveau championnat NBA.